vendredi 31 juillet 2009

Visite

P. m'a emmené voir le peintre Ch H. toujours très actif, mais souffrant des séquelles de la maladie de Lymes propagée par la tique ( parfois par des araignées..). Sa mobilité s'en trouve réduite et handicape ses jours. Vieille connaissance de P., il a évoqué la période de sa jeunesse, ses rencontres, sa vie parisienne, l'année de l'hécatombe où il a enterré une vingtaine de proches, le décès de son compagnon, mort lui aussi du Sida, l'étrangeté qu'il soit resté séronégatif, ce qui a fait et fait toujours de lui un sujet d'étude de la part des chercheurs, sa lutte contre un cancer de la prostate et sa volonté de refuser toute opération souvent émasculante, bref une existence marquée par le bonheur de rencontres exceptionnelles, d'une vie commune de 38 années, et par le malheur d'un drame absolu et d'ennuis de santé qui ne sont pas minces...
Et puis il nous a fait parcourir son jardin qu'il a voulu rendre à la nature en laissant les plantes s'exprimer d'elles-mêmes (en particulier des chélidoines, l'herbe à verrues dont P. se fit une application, et une "forêt" de bambous qui finiront par être totalement envahissants ), sans contrainte, sans retenue, accueillant les oiseaux, les mulots, les musaraignes, les hérissons et toutes sortes de petites bêtes...
Ils nous a montré ensuite ses tableaux, son atelier, privilège rare de la part d'un peintre dont 3000 oeuvres sont présentes dans des collections de part le monde.. J'ai été au regret, comme il me posait la question, de lui dire que la peinture abstraite ne me "disait" rien et que par conséquent j'étais incapable d'émettre une opinion sur sa qualité et sur les émotions qu'elle aurait dû m'inspirer, mais j'ai aimé ses œuvres de jeunesse, les portraits de son ami, d'un dessin parfait, de sa période figurative qu'il a vite abandonnée: j'ai toujours été très franc avec les gens que j'apprécie...
Au retour, P. qui pilotait ( pour une fois mollement) une de ses voitures de collection, faisant la comparaison avec le jardin de la maison voisine à la sienne, qui était à l'abandon depuis que la vielle dame qui y vivait était morte, me dit que Ch. H. ne mourait pas car son jardin après sa mort resterait tel qu'il est déjà et que, ne montrant pas de différence, on ne pourrait pas savoir que Ch H. venait de décéder: c'est, ainsi que P. le fit remarquer, une manière ante mortem de se créer un petit moment d'éternité...

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